Histoire contemporaine

Paul POUPONNOT

le mercredi de 10h00 à 11h30 - Café des Images
8 séances :  16 octobre ; 13 novembre ; 4 décembre  --  8 janvier ; 5 février ; 12 mars ; 23 avril ; 14 mai

La citoyenneté des femmes en éveil durant les Trente Glorieuses - Vers la deuxième vague du féminisme

Depuis 1945 les femmes exercent leur droit de vote. Mais le pouvoir reste profondément masculin. Les femmes restent invisibles dans la conduite des affaires politiques, économiques et sociales. N’oublions pas l’exclamation du général De Gaulle sur la présence des femmes aux commandes étatiques « Et pourquoi pas un ministère du tricot ? ». Le destin des femmes était tout tracé : être épouses et mères.


Cependant au-delà de la reconstruction, la période est marquée par de profonds changements et une transformation souterraine des mentalités féminines s’opère.


Lire dans un journal « Entreprises agricoles » en 1975 « Epouser une agricultrice n’est pas une obligation » ou entendre une femme d’agriculteur en 1967 affirmer « qu’il est inconcevable qu’une femme qui travaille six heures par jour sur une exploitation agricole…soit un zéro social » ! en sont bien la marque.


Cette déclaration d’une femme d’OS (ouvrier spécialisé) à Paris en 1960 : « Et puis j’aimerais avoir une journée à moi entièrement libre, je partirais le matin, ne pensant à rien, j’irais dans les beaux quartiers, où il y a les grands magasins, à flâner, à regarder, vers l’Etoile, l’Opéra…Mais nous, pour le moment, on est obligé de vivre en rêve, comme on dit », exprime, au-delà d’une revendication d’amélioration du niveau de vie, une revendication de sortie du cadre des tâches ménagères.


Ces déclarations s’inscrivent dans une mutation profonde de la France des années 1960 : le taux d’activité des femmes entre 25 et 55 ans augmente ; l’image de la femme active s’impose progressivement et le droit civil suit cette mutation (les femmes ont le droit d’ouvrir un compte bancaire sans l’autorisation de leur père ou de leur mari). La jeunesse se détourne des modèles parentaux. La scolarisation des filles dans le secondaire et le supérieur, en pleine croissance, accentue le phénomène et génère un refus de l’image traditionnelle de la femme, mère experte, fée du logis et épouse.


Des femmes au cours de cette période, par leurs paroles, leurs actions facilitent l’éveil de ce nouvel état d’esprit.

L’insatisfaction qu’exprime une femme, épouse d’un ouvrier et mère de dix enfants, à l’émission télévisée d’Eliane Victor « Les femmes aussi » à propos du bonheur « c’est pas

une vie terre à terre comme celle que je mène » ; ou la rage clamée par une lycéenne « En rang mesdemoiselles, deux par deux et en silence…l’impression d’être un enfant de

troupe » ; ou ces cris lancés par des mères à leurs filles « Pas comme moi » traversent le monde féminin des années 1960.


Pourtant Pierre Viansson-Ponté, directeur du journal « Le Monde » écrit le 15 mars 1968 un article intitulé « Quand La France s’ennuie ». Le 3 mai 1968 commence un cycle de manifestations étudiantes, dans lesquelles filles et femmes sont au coude à coude avec les autres manifestants. Le 14 mai commence la grève générale et l’occupation des usines. Elles y participent mais demeurent invisibles. Et pourtant derrière leur invisibilité jaillissent des questions « Prolétaires de tous les pays qui lave vos chaussettes ? », « Etudiant qui remet tout en question/ As-tu pensé aussi à remettre en question/ les rapports de l’homme à la femme » ; ou comme le dit l’historienne Michèle Zancarini-Fournel « Pour les femmes, mai 1968 fut comme une rivière souterraine ».

Les assignations de genre sont rompues : le 26 août 1970, quelque femmes manifestent à l’Arc de Triomphe avec le mot d’ordre « Il y a plus inconnu que le soldat inconnu -sa femme », un nouveau féminisme est né. 

Le cours de l’année 2024/2025 abordera les aspects suivants :